Un privilège est un droit, un avantage particulier accordé à un individu ou à une collectivité, et dont le commun des mortels ne bénéficie pas.
En Égypte, les prêtres se trouvaient vers le sommet de la pyramide sociale et, du fait de leur fonction, ils vivaient en dehors des règles de droit commun.
Le pharaon les a dispensés de se voir réduits en esclavage comme les cultivateurs contraints de céder leurs terres pour ne pas succomber à la famine.
Un régime d'exception qui n'a rien de surprenant dans un monde où le pouvoir temporel s'appuyait souvent sur les croyances religieuses ...
Dans le Judaïsme, la prêtrise était réservée aux seuls descendants mâles d’Aaron, le frère de Moïse, de la tribu de Lévi.
De ce fait, lors de leur entrée en terre de Canaan, les Lévites n'ont pas eu de territoire affecté.
Les prêtres (cohanim) devant se dévouer au service religieux et ne possédant pas de propriété terrestre, ils avaient droit à 24 dons qui leur étaient exclusivement réservés.
Ces dons pouvaient être faits dans l'aire du Temple, comme à l'intérieur ou à l'extérieur des murs de Jérusalem.
La dîme, ou dixième de la production annuelle, devait être consacré au service du culte :
« Toute dîme de la terre, soit des récoltes de la terre, soit du fruit des arbres, appartient à JHVH. C'est une chose consacrée à JHVH. » (Lévitique 27.30)
Ces principes ont évolué avec le temps dans le Judaïsme et le christianisme primitif n'a nullement retenu une obligation de dîme ou de tout autre don au bénéfice de ceux qui consacrent leur vie au service cultuel.
« Que chacun donne comme il l’a résolu en son cœur, non à regret ou par nécessité, car Dieu aime celui qui donne avec joie. » (2 Corinthiens 9.7)
Le principe de se consacrer au service cultuel trouve sa source dans les premiers temps de l'Eglise :
« Les Douze convoquèrent l'ensemble des disciples et dirent :
"Il ne convient pas d'avoir délaissé la parole de Dieu pour servir aux tables. Cherchez, frères, sept hommes parmi vous ayant bonne réputation, remplis de l'Esprit et de sagesse, que nous chargerons de cette tâche. Nous nous attacherons à la prière et à l'enseignement de la parole. »
(Actes des Apôtres 6.2-4)
Cette décision fut approuvée par l'ensemble des membres alors présents ... mais la Bible ne mentionne pas que le Seigneur ait approuvé cette "division du travail".
Il s'agit donc d'une institution humaine qui allait trouver des prolongements parfois négatifs ... comme toutes institutions humaines.
En effet, le fait de se consacrer au ministère cultuel en a conduit plus d'un à vouloir se distinguer, croyant peut-être que la mission qui lui était confiée l'autorisait à en tirer quelque orgueil ...
Paul, pour sa part, a mis en garde ses contemporains ...
« En effet, qui te distingue ? Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? Et si tu l’as reçu, pourquoi te faire valoir comme si tu ne l’avais pas reçu ? » (1 Corinthiens 4.7)
Si les ministres du culte de l'Eglise des premiers siècles ont probablement su se maintenir dans l'humilité et dans la foi, la dérive des institutions chrétiennes deviendra croissante lorsque le christianisme sera la religion officielle de l'empire romain ... et des états qui lui ont succédé.
Ainsi, la dîme volontaire est devenue une obligation.
En France, lors du concile de Tours en 567, un décret pour la perception de la dîme a été promulgué.
En 585, lors du second concile de Mâcon, un décret a été adopté pour l’excommunication de ceux qui ne paient pas la dîme à l’Église.
Puis le pouvoir civil carolingien s'est engagé à son tour, en rendant la dîme obligatoire dans la législation d'État par le capitulaire d'Herstal (779).
Ce principe est répété par plusieurs autres documents analogues de Charlemagne (780, 789, 801), confirmés par Louis le Pieux, puis par Charles le Chauve (877).
Dans ce monde où la misère et la famine frappaient aux portes, la position privilégiée des ministres du culte devenait très enviable ...
C'est ainsi que ceux qui le pouvaient s'engageaint dans les voix monastiques ou cultuelles pour avoir le gîte et le couvert.
Echappant ainsi aux risques de pénurie alimentaire, on ne peut que s'interroger sur la profondeur de la foi qui les animait.
Qu'en est-il de la foi lorsque le droit impose aux individus de se soumettre ?
La nouvelle loi imposée par l’Église associée à l’État est ainsi venue se substituer à l'ancienne loi de Moïse.
Et les œuvres de la nouvelle loi sont venues s'imposer face à la foi.
Pourtant ... « Personne ne sera justifié devant Lui par les œuvres de la loi. » (Romains 3.20)
Le Seigneur voit l'état de notre cœur !
De nos jours où la dîme a disparu, la justification par la foi et non par les œuvres est devenue la référence dans le monde chrétien.
L'Eglise, comme ses serviteurs cultuels, ont naturellement besoin des dons librement consentis par les fidèles.
Mais il ne doit s'en suivre aucun privilège ni enrichissement personnel.
« Car l’amour de l’argent est la racine de tous les maux. » (1 Timothée 6.10)