C'est auprès d'un puits que le serviteur d'Abraham rencontra Rebecca, la sœur de Laban, qui allait devenir l'épouse d'Isaac.
« La jeune fille avait très belle apparence, vierge car nul homme ne l'avait connue.
Elle descendit à la source, remplit sa jarre et remonta. »
(Genèse 24.16)
Envoyé par Isaac dans la famille de Laban pour y trouver une épouse, Jacob arrive probablement auprès du même puits où il va rencontrer Rachel.
Le puits de Jacob n'est pas une propriété privée, c'est un lieu de passage, un lieu de rencontre, un lieu chargé de symboles.
Un dialogue va s'instaurer entre Jacob et les bergers sur l'opportunité de rouler la pierre afin d'abreuver les troupeaux.
Ceux-ci attendent que tous les troupeaux soient rassemblés.
Jacob n'est pas concerné par cette pratique communautaire qu'il ne semble pas connaître.
Mais pour les bergers, le fait d'abreuver ensemble les troupeaux répond à une règle organisant le partage de l'eau sans qu'il y ait de privilège en faveur de l'un ou de l'autre qui pourrait être abreuvé séparément.
L'eau est un bien précieux, la pierre qui protège le puits doit être roulée à des heures fixes et remise en place afin d'éviter toute déperdition d'eau ou pollution de la nappe.
Cette pierre est lourde, plusieurs hommes sont probablement nécessaires pour la déplacer.
Pourtant, Jacob la déplace seul pour Rachel, la fille de Laban :
« Jacob s'approcha et roula la pierre de la bouche du puits puis donna à boire au troupeau de Laban, le frère de sa mère. » (Genèse 29.10)
Quel sens donner à cet évènement ?
Qui est donc Jacob pour se permettre ainsi de rouler la pierre au bénéfice d'un seul troupeau alors que d'ordinaire il faut attendre que l'ensemble des troupeaux soient présents ?
Jacob va donc commettre un acte qui va à l'encontre des pratiques habituelles.
Jacob avait été visité par JHVH et reçu la promesse suivante :
« Voici ! Je suis avec toi, et je te garde partout où tu vas. Je te ramènerai sur cette terre et ne t'abandonnerai point tant que je n'aurai fait ce que j'ai dit. » (Genèse 28.15)
Ceci n'en fait pas pour autant un surhomme mais quelqu'un qui est profondément béni de Dieu.
Il devient ainsi pour Dieu un "chargé de mission", un "homme de main".
Rouler une pierre entre tout à fait dans ses prérogatives, même si ce n'est pas le moment prescrit par l'usage.
« Qui nous roulera la pierre hors de l'orifice du tombeau ? » (Evangile selon Marc 16.3)
Nous voici projetés deux mille ans plus tard.
Jacob avait roulé sans problème la pierre du puits ... mais les femmes qui se présentent pour embaumer le corps de Jésus s'interrogent.
Tout comme plusieurs hommes pouvaient être nécessaires pour rouler la pierre du puits, plusieurs doivent unir leurs forces pour mettre en place et ôter la pierre qui obstrue le tombeau.
Pour servir Rachel, Jacob a roulé la pierre.
Afin de permettre aux femmes d'entrer dans le tombeau de Jésus, c'est un ange qui a roulé la pierre.
« Un ange du Seigneur descendu du ciel s'approcha, roula la pierre sur le côté et s’assit dessus. » (Evangile selon Matthieu 28.2)
Quel rapport entre ces deux pierres ?
L'une recouvre un puits ... l'autre un tombeau.
Mais le puits de Jacob recouvert par la première pierre est probablement le même que celui auprès duquel Jésus s'est assis deux mille ans plus tard pour dire à la femme samaritaine :
« Celui qui boit de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif. Car l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau d'où jaillira la vie éternelle. » (Evangile selon Jean 4.14)
L'eau qui jaillit du puits de Jacob, et auprès duquel Jésus s'est assis, a pu abreuver des hommes et des animaux pendant des siècles.
Le fait de rouler cette pierre n'a jamais permis de faire jaillir une source de vie éternelle.
Par contre, après avoir roulé la pierre du tombeau du Christ, la vie éternelle a jailli de ce tombeau en permettant à celui qui était ressuscité des morts ... de nous abreuver de sa source d'eau vive.