Il est bien difficile de nos jours de comprendre à quoi peut correspondre le port du voile.
Et l'ignorance vient souvent fausser les jugements.
La première preuve écrite du port du voile vient de la Mésopotamie où le culte de la déesse Ishtar était associé à la prostitution sacrée.
Ishtar, nom akkadien de la déesse, était représentée voilée.
Cette déesse est appelée "hiérodule d’An", An étant le plus ancien dieu des Sumériens et le terme de "hiérodule" signifie "prostituée sacrée".
Ainsi, en 2 300 avant Jésus-Christ, le port du voile semblait être un signe distinctif pour identifier les prostituées dans cette partie du monde.
Retournement de situation dans les siècles qui ont suivi !
Toujours dans la même région, en Assyrie vers 1 100 avant Jésus-Christ, une loi réglemente le port du voile en ces termes :
"Les femmes mariées (...) qui sortent dans la rue n’auront pas leur tête découverte.
Les filles d’hommes libres seront voilées. La concubine qui va dans les rues avec sa maîtresse sera voilée.
La prostituée ne sera pas voilée, sa tête sera découverte."
Désormais, c'est l'absence de voile qui permet d'identifier une prostituée !
Les êtres humains ont ainsi développé au fil des temps et des cultures une codification des comportements à l'aide de signes distinctifs.
L'habillement, la coiffure, servent souvent de conventions pour définir le statut social d'une personne.
Le port du voile en Assyrie, et par la suite dans de nombreuses régions et cultures, signifie que la personne n'est pas disponible pour un rapport entrant dans le champ de la prostitution.
Par ailleurs, le port d'une alliance permet au premier regard de supposer que la personne est mariée, donc non disponible pour une éventuelle aventure amoureuse.
Dans le cas de Rebecca, il apparaît qu'elle ne portait pas d'ordinaire de voile.
Cela ne faisait pas partie des coutumes de sa famille sauf lorsqu'il s'agit d'être confrontée à celui qui doit devenir son futur époux.
Le fait de se voiler avant le mariage est en fait un rituel qui a conservé son prolongement de nos jours.
Lorsque les mariés s'unissent à l'église, le voile de la mariée peut être porté jusqu'à ce que le couple soit déclaré "mari et femme" devant le prêtre.
Ainsi, l'homme est autorisé à découvrir sa femme et à l'embrasser officiellement lorsqu'il retire son voile.
Le fait de "dévoiler" l'épouse préfigure l'acte par lequel celle-ci est sensée perdre sa virginité.
Ainsi, le port du voile est chargé de tradition : il symbolise la virginité et la pureté, et, toujours dans une approche symbolique, il protège cette virginité.
Rien d'étonnant que les traditions religieuses se soient emparées de ce symbole.
Et il n'est pas plus surprenant que dans notre monde moderne le fait d'imposer ainsi le port du voile aux femmes soit conçu comme une aliénation de leur liberté.
La Bible pour sa part a réservé le port du voile à certaines circonstances.
En Judée, au temps de Jésus, les femmes portaient le voile.
Paul, dans la Première Epître aux Corinthiens (11.2-16), insiste sur la nécessité pour la femme de se couvrir la tête quand elle prie ou prophétise.
De ce fait, la tradition catholique a longuement maintenu une telle obligation.
Il faut attendre octobre 1964 pour que les femmes soient autorisées à entrer tête nue dans les églises catholiques.
Auparavant elles étaient tenues de porter une voilette (fixée au chapeau) ou une mantille (dentelle) ou un foulard (carré) ou un fichu (triangulaire).
L'obligation pour les femmes de se couvrir la tête ne disparaît du code de droit canonique qu'en 1983.
Singulièrement, alors que l'occident chrétien évoluait en matière de droits de la femme, le monde musulman s'est mis à régresser, notamment avec la révolution iranienne de 1979.
Chacun demeure libre, en France, de rester attaché aux traditions ... mais à condition de respecter la liberté d'autrui de vouloir s'en délivrer.
Quant à Rebecca, il semble bien que personne ne lui ait imposé de voile.
En se couvrant, son geste révèle sa dignité face à celui qui deviendra son époux ... et qui devra la respecter.
Car la dignité de la personne humaine est un principe selon lequel toute personne ne doit jamais être traitée comme un objet ou comme un moyen, mais comme un être digne de respect et d'amour.