Etudes et commentaires de la Bible

Jérémie ... chapitre 2 : Le temps de l'apostasie

La Bible et les prophètes

Traduction Louis Segond 1910

1 La parole de l’Eternel me fut adressée, en ces mots :

2 Va, et crie aux oreilles de Jérusalem : Ainsi parle l’Eternel : Je me souviens de ton amour lorsque tu étais jeune, De ton affection lorsque tu étais fiancée, Quand tu me suivais au désert, Dans une terre inculte.

3 Israël était consacré à l’Eternel, Il était les prémices de son revenu ; Tous ceux qui en mangeaient se rendaient coupables, Et le malheur fondait sur eux, dit l’Eternel.

4 Ecoutez la parole de l’Eternel, maison de Jacob, Et vous toutes, familles de la maison d’Israël !

5 Ainsi parle l’Eternel : Quelle iniquité vos pères ont-ils trouvée en moi, Pour s’éloigner de moi, Et pour aller après des choses de néant et n’être eux-mêmes que néant ?

6 Ils n’ont pas dit : Où est l’Eternel, Qui nous a fait monter du pays d’Egypte, Qui nous a conduits dans le désert, Dans une terre aride et pleine de fosses, Dans une terre où règnent la sécheresse et l’ombre de la mort, Dans une terre par où personne ne passe, Et où n’habite aucun homme ?

7 Je vous ai fait venir dans un pays semblable à un verger, Pour que vous en mangiez les fruits et les meilleures productions ; Mais vous êtes venus, et vous avez souillé mon pays, Et vous avez fait de mon héritage une abomination.

8 Les sacrificateurs n’ont pas dit : Où est l’Eternel ? Les dépositaires de la loi ne m’ont pas connu, Les pasteurs m’ont été infidèles, Les prophètes ont prophétisé par Baal, Et sont allés après ceux qui ne sont d’aucun secours.

9 C’est pourquoi je veux encore contester avec vous, dit l’Eternel, Je veux contester avec les enfants de vos enfants.

10 Passez aux îles de Kittim, et regardez ! Envoyez quelqu’un à Kédar, observez bien, Et regardez s’il y a rien de semblable !

11 Y a-t-il une nation qui change ses dieux, Quoiqu’ils ne soient pas des Dieux ? Et mon peuple a changé sa gloire contre ce qui n’est d’aucun secours !

12 Cieux, soyez étonnés de cela ; Frémissez d’épouvante et d’horreur ! dit l’Eternel.

13 Car mon peuple a commis un double péché : Ils m’ont abandonné, moi qui suis une source d’eau vive, Pour se creuser des citernes, des citernes crevassées, Qui ne retiennent pas l’eau.

14 Israël est-il un esclave acheté, ou né dans la maison ? Pourquoi donc devient-il une proie ?

15 Contre lui les lionceaux rugissent, poussent leurs cris, Et ils ravagent son pays ; Ses villes sont brûlées, il n’y a plus d’habitants.

16 Même les enfants de Noph et de Tachpanès Te briseront le sommet de la tête.

17 Cela ne t’arrive-t-il pas Parce que tu as abandonné l’Eternel, ton Dieu, Lorsqu’il te dirigeait dans la bonne voie ?

18 Et maintenant, qu’as-tu à faire d’aller en Egypte, Pour boire l’eau du Nil ? Qu’as-tu à faire d’aller en Assyrie, Pour boire l’eau du fleuve ?

19 Ta méchanceté te châtiera, et ton infidélité te punira, Tu sauras et tu verras que c’est une chose mauvaise et amère D’abandonner l’Eternel, ton Dieu, Et de n’avoir de moi aucune crainte, Dit le Seigneur, l’Eternel des armées.

20 Tu as dès longtemps brisé ton joug, Rompu tes liens, Et tu as dit : Je ne veux plus être dans la servitude ! Mais sur toute colline élevée Et sous tout arbre vert Tu t’es courbée comme une prostituée.

21 Je t’avais plantée comme une vigne excellente Et du meilleur plant ; Comment as-tu changé, Dégénéré en une vigne étrangère ?

22 Quand tu te laverais avec du nitre, Quand tu emploierais beaucoup de potasse, Ton iniquité resterait marquée devant moi, Dit le Seigneur, l’Eternel.

23 Comment dirais-tu : Je ne me suis point souillée, Je ne suis point allée après les Baals ? Regarde tes pas dans la vallée, Reconnais ce que tu as fait, Dromadaire à la course légère et vagabonde !

24 Anesse sauvage, habituée au désert, Haletante dans l’ardeur de sa passion, Qui l’empêchera de satisfaire son désir ? Tous ceux qui la cherchent n’ont pas à se fatiguer ; Ils la trouvent pendant son mois.

25 Ne t’expose pas à avoir les pieds nus, Ne dessèche pas ton gosier ! Mais tu dis : C’est en vain, non ! Car j’aime les dieux étrangers, je veux aller après eux.

26 Comme un voleur est confus lorsqu’il est surpris, Ainsi seront confus ceux de la maison d’Israël, Eux, leurs rois, leurs chefs, Leurs sacrificateurs et leurs prophètes.

27 Ils disent au bois : Tu es mon père ! Et à la pierre : Tu m’as donné la vie ! Car ils me tournent le dos, ils ne me regardent pas. Et quand ils sont dans le malheur, ils disent : Lève-toi, sauve-nous !

28 Où donc sont tes dieux que tu t’es faits ? Qu’ils se lèvent, s’ils peuvent te sauver au temps du malheur ! Car tu as autant de dieux que de villes, ô Juda !

29 Pourquoi contesteriez-vous avec moi ? Vous m’avez tous été infidèles, dit l’Eternel.

30 En vain ai-je frappé vos enfants ; Ils n’ont point eu égard à la correction ; Votre glaive a dévoré vos prophètes, Comme un lion destructeur.

31 Hommes de cette génération, considérez la parole de l’Eternel ! Ai-je été pour Israël un désert, Ou un pays d’épaisses ténèbres ? Pourquoi mon peuple dit-il : Nous sommes libres, Nous ne voulons pas retourner à toi ?

32 La jeune fille oublie-t-elle ses ornements, La fiancée sa ceinture ? Et mon peuple m’a oublié Depuis des jours sans nombre.

33 Comme tu es habile dans tes voies pour chercher ce que tu aimes ! C’est même au crime que tu les exerces.

34 Jusque sur les pans de ton habit se trouve Le sang de pauvres innocents, Que tu n’as pas surpris faisant effraction.

35 Malgré cela, tu dis : Oui, je suis innocente ! Certainement sa colère s’est détournée de moi ! Voici, je vais contester avec toi, Parce que tu dis : Je n’ai point péché.

36 Pourquoi tant d’empressement à changer ton chemin ? C’est de l’Egypte que viendra ta honte, Comme elle est venue de l’Assyrie.

37 De là aussi tu sortiras, les mains sur la tête ; Car l’Eternel rejette ceux en qui tu te confies, Et tu ne réussiras pas auprès d’eux.

Traduction œcuménique de la Bible

1. La parole du SEIGNEUR s'adressa à moi :

2. Va clamer aux oreilles de Jérusalem : Ainsi parle le SEIGNEUR : Je te rappelle ton attachement, du temps de ta jeunesse, ton amour de jeune mariée ; tu me suivais au désert, dans une terre inculte.

3. Israël était chose réservée au SEIGNEUR, prémices qui lui reviennent ; quiconque en mangeait devait l'expier : le malheur venait à sa rencontre – oracle du SEIGNEUR.

4. Ecoutez la parole du SEIGNEUR, vous, la communauté de Jacob avec toutes les familles de la communauté d'Israël :

5. Ainsi parle le SEIGNEUR : En quoi vos pères m'ont-ils trouvé en défaut pour qu'ils se soient éloignés de moi ? Ils ont couru après des riens et les voilà réduits à rien.

6. Ils n'ont pas dit : « Où est le SEIGNEUR qui nous a fait monter du pays d'Egypte, qui fut notre guide au désert, au pays des steppes et des pièges, pays de la sécheresse et de l'ombre mortelle, pays où nul ne passe, où personne ne réside ? »

7. Je vous ai fait entrer au pays des vergers pour que vous en goûtiez les fruits et la beauté. Mais en y pénétrant, vous avez souillé mon pays et vous avez fait de mon patrimoine une horreur.

8. Les prêtres ne disent pas : « Où est le SEIGNEUR ? » Ceux qui détiennent les directives divines ne me connaissent pas. Les bergers se révoltent contre moi. Les prophètes prophétisent au nom de Baal et ils courent après ceux qui ne servent à rien.

9. Aussi vais-je encore plaider contre vous – oracle du SEIGNEUR – et plaider contre les fils de vos fils.

10. Passez donc aux rives des Kittim et regardez ; envoyez à Qédar et informez-vous bien ; regardez si pareille chose est arrivée :

11. une nation change-t-elle de dieux ? – et pourtant ce ne sont pas des dieux ! Mon peuple, lui, échange sa gloire contre ce qui ne sert à rien.

12. De cela soyez stupéfaits, vous, les cieux, soyez-en horrifiés, profondément navrés – oracle du SEIGNEUR !

13. Oui, il est double, le méfait commis par mon peuple : ils m'abandonnent, moi, la source d'eau vive, pour se creuser des citernes, des citernes fissurées qui ne retiennent pas l'eau.

14. Israël est-il un esclave, est-il né dans la servitude ? Pourquoi devient-il une proie ?

15. Contre lui rugissent les jeunes lions ; ils donnent de la voix ; on transforme son pays en désolation ; ses villes sont incendiées, vidées de leurs habitants.

16. Même les gens de Memphis et de Daphné te défoncent le crâne.

17. Qu'est-ce qui te vaut cela, sinon d'avoir abandonné le SEIGNEUR ton Dieu au temps où il était ton guide sur la route ?

18. Et maintenant qu'est-ce qui t'attire sur la route de l'Egypte pour aller t'abreuver à l'étang d'Horus ? Et qu'est-ce qui t'attire sur la route de l'Assyrie pour aller t'abreuver au Fleuve ?

19. Que ton mal te châtie ! Que ton apostasie te corrige ! Eprouve jusqu'au bout la douleur et l'amertume d'avoir abandonné le SEIGNEUR ton Dieu ! Oui, tu ne trembles même plus devant moi – oracle du Seigneur, DIEU de l'univers.

20. Depuis toujours tu as brisé ton joug, rompu tes liens, en disant : « Je ne veux plus être esclave. » Sur toute colline élevée, sous tout arbre vert, tu t'étales en prostituée.

21. Moi, je t'avais plantée, vignoble de choix, tout entier en cépage franc. Comment as-tu dégénéré en vigne inconnue aux fruits infects ?

22. Même si tu te laves avec de la soude et que tu emploies des flots de lessive, la crasse de ta perversion subsiste devant moi – oracle du Seigneur DIEU.

23. Comment oses-tu dire : « Je ne suis pas souillée, je ne cours pas après les Baals » ? Vois ta conduite dans le vallon ; reconnais ce que tu fais. Une chamelle légère qui entrecroise ses traces !

24. Une ânesse sauvage habituée à la steppe ! En chaleur, elle renifle le vent ; son rut, qui peut le refouler ? Tous ceux qui la cherchent n'ont pas à se fatiguer, ils la trouvent en son mois.

25. Halte ! sinon tu deviens une va-nu-pieds, et ton gosier va se dessécher. Mais tu dis : « Rien à faire ! Non ! Je raffole des étrangers et je veux courir après eux. »

26. Comme est confondu un voleur pris sur le fait, ainsi sont confondus les gens d'Israël, – eux, leurs rois, leurs ministres, leurs prêtres et leurs prophètes.

27. Ils disent au bois : « Tu es mon père ! », à la pierre : « C'est toi qui m'as enfanté. » Oui, ils me présentent la nuque et non la face ; mais dès qu'ils sont malheureux, ils me disent : « Lève-toi ! Sauve-nous ! »

28. Où sont-ils les dieux de ta fabrication ? Qu'ils se lèvent s'ils peuvent te sauver quand tu es malheureuse, puisque tes dieux sont devenus aussi nombreux que tes villes, ô Juda !

29. Pourquoi plaidez-vous contre moi ? Tous vous vous êtes révoltés contre moi – oracle du SEIGNEUR.

30. C'est en vain que je frappe vos fils ; ils n'acceptent pas la leçon. Votre épée dévore vos prophètes, tel un lion ravageur.

31. Vous, hommes de ce temps, comprenez la parole du SEIGNEUR ! Suis-je devenu un désert pour Israël ? Le pays de la nuit noire ? Pourquoi ceux de mon peuple disent-ils : « Nous allons où nous voulons, nous ne viendrons plus à toi » ?

32. Une jeune fille oublie-t-elle sa parure ? Une mariée, sa robe ? Mais ceux de mon peuple m'oublient depuis des jours et des jours.

33. Comme tu combines bien tes intrigues pour rechercher l'amour ! Vraiment tu es allée jusqu'à t'habituer au crime.

34. Le sang des pauvres, des innocents, se trouve jusque sur les pans de tes vêtements. C'est bien sur tout cela que je le trouve, non sur un mur percé.

35. Tu dis : « Je suis innocente ; sa colère va sûrement se détourner de moi. » Or moi, je te poursuis en justice parce que tu dis : « Je ne suis pas fautive. »

36. Comme tu t'avilis en variant tes intrigues ! Tu récolteras autant de honte de l'Egypte que de l'Assyrie.

37. De là aussi tu sortiras les mains sur la tête. Oui, le SEIGNEUR méprise ton système de sécurité ; ce n'est pas ainsi que tu réussiras…

Commentaires du chapitre 2

2.1 à 2.3 : La flamme des premiers temps
Comparons le second verset à celui-ci :

« Mais j’ai contre toi d'avoir abandonné ton premier amour. » (Apocalypse 2.4)

Jérémie se réfère au temps où Israël a hérité de la Terre promise après la traversée du désert.

C'est un temps de conquêtes et de victoires face aux peuples qui habitaient Canaan.

Nul ne pouvait lui résister avec le soutien du Seigneur.

L'auteur de l'Apocalypse s'adresse à une Eglise, celle d'Ephèse, qui a connu aussi un temps de relation privilégiée avec son Seigneur.

Dans l'un et l'autre cas, cette relation repose sur la fidélité envers le Dieu unique.

2.4 à 2.13 : La source de vie
Passé le temps de la fidélité...

« Ils ont couru après des riens et les voilà réduits à rien. » (verset 5)

Les Israélites se sont détournés de leur Seigneur pour rechercher les dieux des païens.

Pour leur part, les Ephésiens se voient reprocher d'avoir renoncé à leurs « premières œuvres. » (Apocalypse 2.5)

De quoi s'agit-il ?

Nous pouvons lire par ailleurs ceci :

« Quant à moi, j'ai appris votre foi dans le Seigneur Jésus et votre amour pour tous les saints. » (Ephésiens 1.15)

Aux premiers temps de cette Eglise, la foi animait ses membres.

En retour de cette fidélité, le Seigneur abreuvait Son peuple à « la source d'eau vive ». (verset 13)

Cette métaphore illustre la dimension éternelle de la relation que le Seigneur peut établir avec les siens.

Jésus a tenu des propos similaires quand Il a dit à la Samaritaine :

« Mais celui qui boit de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif. Car l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau d'où jaillira la vie éternelle. » (Jean 4.14)

2.14 à 2.19 : Un peuple humilié
La question posée sur le statut d'esclave du peuple israélite mérite d'être posée.

Esclave en Egypte au service du pharaon et des siens, Israël est libérée sous la conduite Moïse.

Israël triomphe ensuite, dirigé par Josué pour conquérir la Terre promise.

Le peuple de Dieu connaîtra encore la gloire au temps de David et Salomon puis la division entre le Royaume du Nord et celui de Juda a facilité l'infiltration de l'idolâtrie païenne.

Ce peuple de vainqueurs doit maintenant s'humilier et chercher des soutiens tantôt en Egypte, tantôt en Assyrie (verset 18).

Cette compromission avec des puissances voisines a été précédemment dénoncée par le prophète Osée :

« Ephraïm est une colombe naïve et sans cervelle : ils appellent l’Égypte, ils courent en Assyrie. » (Osée 7.11)

Tout ceci est le fruit de son infidélité, de son apostasie (verset 19).

2.20 à 2.29 : L'infidélité
Cette infidélité va faire l'objet d'un long développement à partir du verset 20.

L'image de la vigne est utilisée au verset 21 en référence à un produit de qualité planté par le Seigneur.

Il n'en reste qu'une production pervertie.

Nous trouvons par ailleurs une parabole sur la vigne en Esaïe 5.1-4 :

« Mon bien-aimé avait une vigne sur un coteau plantureux.

Il y retourna la terre, enleva les pierres, et installa un plant de choix. Au milieu, il bâtit une tour et il creusa aussi un pressoir. Il en attendait de beaux raisins, il n’en eut que de mauvais.

Et maintenant, habitants de Jérusalem et gens de Juda, soyez donc juges entre moi et ma vigne.

Pouvais-je faire pour ma vigne plus que je n’ai fait ? J’en attendais de beaux raisins, pourquoi en a-t-elle produit de mauvais ? »

A ceci s'ajoute le mensonge car les Israélites nient leur soumission aux dieux étrangers comme les Baals (verset 23).

Aussi le Seigneur compare leur comportement à de la débauche (verset 25).

Le verset 27 souligne l'attitude contradictoire de ceux qui honorent des idoles mortes de bois et de pierre mais se tournent vers le Dieu vivant quand ils sont dans la détresse.

Aussi le Seigneur les invite à s'adresser à leurs idoles et non à Lui (verset 28).

2.30 à 2.37 : Le réquisitoire du Seigneur
Les derniers versets récapitulent les reproches du Seigneur :

- l'insoumission (verset 31),

- la négligence dans le culte (verset 32),

- les intrigues (verset 33),

- les injustices (verset 34),

- le mensonge (verset 35).

Le verdict est attendu : coupable !

La sanction est prononcée au verset 37 car c'est le prisonnier qui sort les mains sur la tête pour être conduit comme un esclave.

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