Etudes et commentaires de la Bible

Esaïe ... chapitre 63 : Une relation mouvementée

La Bible et les prophètes

Traduction Louis Segond 1910

1 Qui est celui-ci qui vient d’Edom, De Botsra, en vêtements rouges, En habits éclatants, Et se redressant avec fierté dans la plénitude de sa force ? -C’est moi qui ai promis le salut, Qui ai le pouvoir de délivrer. -

2 Pourquoi tes habits sont-ils rouges, Et tes vêtements comme les vêtements de celui qui foule dans la cuve ? -

3 J’ai été seul à fouler au pressoir, Et nul homme d’entre les peuples n’était avec moi ; Je les ai foulés dans ma colère, Je les ai écrasés dans ma fureur ; Leur sang a jailli sur mes vêtements, Et j’ai souillé tous mes habits.

4 Car un jour de vengeance était dans mon coeur, Et l’année de mes rachetés est venue.

5 Je regardais, et personne pour m’aider ; J’étais étonné, et personne pour me soutenir ; Alors mon bras m’a été en aide, Et ma fureur m’a servi d’appui.

6 J’ai foulé des peuples dans ma colère, Je les ai rendus ivres dans ma fureur, Et j’ai répandu leur sang sur la terre.

7 Je publierai les grâces de l’Eternel, les louanges de l’Eternel, D’après tout ce que l’Eternel a fait pour nous ; Je dirai sa grande bonté envers la maison d’Israël, Qu’il a traitée selon ses compassions et la richesse de son amour.

8 Il avait dit : Certainement ils sont mon peuple, Des enfants qui ne seront pas infidèles ! Et il a été pour eux un sauveur.

9 Dans toutes leurs détresses ils n’ont pas été sans secours, Et l’ange qui est devant sa face les a sauvés ; Il les a lui-même rachetés, dans son amour et sa miséricorde, Et constamment il les a soutenus et portés, aux anciens jours.

10 Mais ils ont été rebelles, ils ont attristé son esprit saint ; Et il est devenu leur ennemi, il a combattu contre eux.

11 Alors son peuple se souvint des anciens jours de Moïse : Où est celui qui les fit monter de la mer, Avec le berger de son troupeau ? Où est celui qui mettait au milieu d’eux son esprit saint ;

12 Qui dirigea la droite de Moïse, Par son bras glorieux ; Qui fendit les eaux devant eux, Pour se faire un nom éternel ;

13 Qui les dirigea au travers des flots, Comme un coursier dans le désert, Sans qu’ils bronchassent ?

14 Comme la bête qui descend dans la vallée, L’esprit de l’Eternel les a menés au repos. C’est ainsi que tu as conduit ton peuple, Pour te faire un nom glorieux.

15 Regarde du ciel, et vois, De ta demeure sainte et glorieuse : Où sont ton zèle et ta puissance ? Le frémissement de tes entrailles et tes compassions Ne se font plus sentir envers moi.

16 Tu es cependant notre père, Car Abraham ne nous connaît pas, Et Israël ignore qui nous sommes ; C’est toi, Eternel, qui es notre père, Qui, dès l’éternité, t’appelles notre sauveur.

17 Pourquoi, ô Eternel, nous fais-tu errer loin de tes voies, Et endurcis-tu notre coeur contre ta crainte ? Reviens, pour l’amour de tes serviteurs, Des tribus de ton héritage !

18 Ton peuple saint n’a possédé le pays que peu de temps ; Nos ennemis ont foulé ton sanctuaire.

19 Nous sommes depuis longtemps comme un peuple que tu ne gouvernes pas, Et qui n’est point appelé de ton nom…

Traduction œcuménique de la Bible

1. Qui est donc celui-ci qui vient d'Edom, de Boçra, avec du cramoisi sur ses habits, bombant le torse sous son vêtement, arqué par l'intensité de son énergie ? – C'est moi qui parle de justice, qui querelle pour sauver.

2. – Pourquoi y a-t-il du rouge à ton vêtement, pourquoi tes habits sont-ils comme ceux d'un fouleur au pressoir ?

3. – La cuvée, je l'ai foulée seul, parmi les peuples, personne n'était avec moi ; alors je les ai foulés, dans ma colère, je les ai talonnés, dans ma fureur ; leur jus a giclé sur mes habits et j'ai taché tous mes vêtements.

4. Dans mon cœur, en effet c'était jour de vengeance, l'année de ma rédemption était venue.

5. J'ai regardé : aucune aide ! je me suis désolé : aucun soutien ! Alors mon bras m'a sauvé et ma fureur a été mon soutien.

6. J'ai écrasé les peuples, dans ma colère, je les ai enivrés, dans ma fureur : leur prestige, je l'ai fait tomber à terre !

7. Je rappellerai les bienfaits du SEIGNEUR, les louanges célébrant le SEIGNEUR, selon tout ce que le SEIGNEUR a mis en œuvre pour nous, oui, sa grande bonté pour la maison d'Israël, qu'il a mise en œuvre pour eux selon sa tendresse, prodigue en bienfaits.

8. Il avait dit : « Vraiment, ils sont mon peuple, des fils qui ne trompent pas », et il fut pour eux un Sauveur

9. dans toutes leurs détresses. Ce n'est pas un délégué ni un messager, c'est lui, en personne, qui les sauva : dans son amour et dans sa compassion, c'est lui-même qui les racheta. Il les souleva, il les porta tous les jours d'autrefois.

10. Mais eux se cabrèrent, ils accablèrent son Esprit saint. Alors il se retourna contre eux en ennemi, lui-même se mit en guerre contre eux.

11. Son peuple alors se rappela les jours du temps de Moïse : « Où est celui qui fit remonter de la mer le berger de son troupeau ? Où est Celui qui mit en lui son Esprit saint ?

12. Celui qui fit avancer, à la droite de Moïse, son bras resplendissant ? Celui qui fendit les eaux devant eux pour se faire un nom éternel ?

13. Celui qui les fit avancer dans les abîmes ? Tel un cheval dans le désert ils ne trébuchaient pas,

14. tel du bétail qui descend une combe l'Esprit du SEIGNEUR les menait au repos. » C'est ainsi que tu as conduit ton peuple, pour te faire un nom resplendissant.

15. Regarde et vois, depuis le ciel, depuis ton palais saint et splendide : où sont donc ton ardeur et ta vaillance, l'émoi de tes entrailles ? Tes tendresses pour moi ont-elles été contenues ?

16. C'est que notre Père, c'est toi ! Abraham en effet ne nous connaît pas, Israël ne nous reconnaît pas non plus ; c'est toi, SEIGNEUR, qui es notre Père, notre Rédempteur depuis toujours, c'est là ton nom.

17. Pourquoi nous fais-tu errer, SEIGNEUR, loin de tes chemins, et endurcis-tu nos cœurs qui sont loin de te craindre ? Reviens, pour la cause de tes serviteurs, des tribus de ton patrimoine.

18. C'est pour peu de temps que ton peuple saint est entré dans son héritage ; nos agresseurs l'ont écrasé, ton sanctuaire !

19. Et depuis longtemps nous sommes ceux sur qui tu n'exerces plus ta souveraineté, ceux sur qui ton nom n'est plus appelé.

Commentaires du chapitre 63

63.1 à 63.6 : Le jugement de Dieu
L'exil à Babylone s'est accompagné, en 587 avant Jésus Christ, d'une dévastation à laquelle ont participé les Edomites.

Ainsi le personnage qui s'avance fièrement au premier verset est une évocation d'Esaü, c'est-à-dire Edom.

Le cramoisi de ses vêtements est à l'image d'Esaü qui était roux et velu.

Mais en retour, le Seigneur va aussi afficher le rouge, celui du vin (verset 2) qui symbolise le sang des peuples (verset 3).

Cette vision est violente :

« J'ai écrasé les peuples, dans ma colère, je les ai enivrés, dans ma fureur... » (verset 6)

Elle sera reprise en Apocalypse 14.19 :

« Et l’ange jeta sa faucille sur la terre. Il vendangea la vigne de la terre et jeta la vendange dans la grande cuve de la colère de Dieu. »

Elle annonce le jugement de Dieu.

63.7 à 63.14 : Les méandres de la foi
Le verset 7 exprime la soumission du prophète face à la colère de Dieu manifestée aux versets précédents.

Esaïe préfère louer le Seigneur, rappeler à quel point il fut bénéfique pour Israël de s'en remettre à Lui.

Mais en retour de la miséricorde divine, Israël a résisté.

Il faut toujours avoir en mémoire que le nom d'Israël, donné à Jacob en Genèse 32.28, est motivé comme suit :

« Ton nom ne se dira plus "Jacob", mais plutôt "Israël", car tu as lutté avec Elohim et avec les hommes, et tu as triomphé. »

Il venait de livrer un combat avec un envoyé de Dieu sous forme humaine, il a ainsi résisté à Dieu comme aux hommes.

Israël doit assumer son ambiguïté.

Son histoire sera une alternance de périodes ou se succèderont la foi, le rachat et la bénédiction de Dieu, d'une part, et la résistance, les épreuves, et le retrait du Seigneur, d'autre part.

63.15 à 63.19 : Appel au Rédempteur
A l'image de cette relation mouvementée, les prophéties d'Esaïe manifestent en alternance la colère et le pardon du Seigneur.

A partir du verset 15, le prophète en appelle à la fois au peuple qui devrait se repentir et à Dieu dans le cadre d'un dialogue.

C'est aussi une prière, une supplique vers le ciel pour mettre en avant la puissance du Rédempteur.

Le prophète veut ainsi intercéder.

Le verset 19 manifeste la résignation face à cet état de faits.

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