« De tout animal pur qui sera pur pour Israël.
D’où nous apprenons que Noa‘h a étudié la Tora. »
Ce commentaire du rabbin Rachi qui vécut au XIe siècle peut paraître bien surprenant.
Il va en effet à l'encontre des conceptions courantes selon lesquelles la Torah (ou Pentateuque) aurait été révélée à partir de Moïse.
D'après la tradition juive, les cinq premiers livres de la Bible furent révélés à Moïse par Dieu, dont une partie sur le mont Sinaï.
Diverses opinions ont cours dans la littérature rabbinique quant au moment où la Torah fut révélée dans sa totalité :
- pour certains, elle fut donnée d'un bloc sur le mont Sinaï,
- d'autres pensent que la Torah fut révélée pour partie sur le Sinaï et que le reste serait venu ensuite jusqu'à la mort de Moïse,
- enfin une autre école de pensée considère que la Torah, bien qu'ayant été écrite par Moïse dans sa quasi-totalité, fut complétée après sa mort par Josué.
Mais tout ceci ne permet pas d'envisager que Noé ait pu en avoir connaissance ... avant qu'elle soit révélée à Moïse, avant même le Déluge !
Comment d'ailleurs comprendre que ce verset de la Genèse distingue les animaux purs des animaux impurs ... alors que ceci fut dicté ultérieurement à Moïse.
Il s'agit de toute évidence d'une adjonction au texte initial qui introduit au chapitre 7 de la Genèse un principe de la Loi mosaïque alors que celle-ci n'existait pas encore.
Le Judaïsme non orthodoxe accepte la critique biblique en soulignant que, si la Torah n'a pas été écrite dans sa totalité par Moïse, elle est néanmoins d'origine divine, les scribes ayant été inspirés par Dieu.
De ce fait, les adjonctions comme celle-ci devraient être considérées comme inspirées par Dieu même si elles altèrent le texte initial.
On ne peut passer sous silence le fait que les recherches relatives à la composition des textes bibliques, dont la Genèse, permettent de considérer que ce que nous en connaissons actuellement provient de différentes sources orales, puis écrites.
Que la trame de base soit attribuée à Moïse ne doit pas éluder le fait que les scribes ont pu apporter par la suite de multiples corrections.
Ceci ne facilite pas l'approche historique.
Mais cela n'ôte rien à la portée du texte biblique car, comme l'écrivait l'apôtre Paul :
« Toute Ecriture inspirée de Dieu est aussi utile à l'enseignement, pour réfuter, pour corriger, pour éduquer dans la justice. » (2 Timothée 3.16)
Dans l'Arche de Noé, tous les animaux ont trouvé place, qu'ils soient considérés comme purs ou impurs aux yeux de la Loi de Moïse.
Car en fait, aux yeux du Dieu créateur de toutes les espèces, une telle distinction qui a pu trouver sa place dans l'esprit religieux du Judaïsme afin de répondre aux mentalités de cette époque, est devenue caduque par la suite.
C'est pourquoi Pierre en eut la révélation dans une vision :
« Ce que Dieu a rendu pur, ne le regarde pas comme souillé. » (Actes 10.15)
Pour le chrétien, il n'y a plus d'animaux purs ou impurs ... car il n'y en avait pas lorsque Dieu les a créés.
Tout ce qu'il a fait était pur parce que c'était très bon !
« Et il vit, Elohim, tout ce qu’il avait fait et voici : très bon ! » (Genèse 1.31)