George Smith, un graveur, était devenu spécialiste en assyriologie au British Museum.
Il a appris seul à déchiffrer les caractères cunéiformes, la plus ancienne écriture connue.
Le 3 décembre 1872, devant un auditoire surpris, George Smith fait le récit du Déluge, non en s'inspirant de la Bible mais d'après un texte mésopotamien qui semble antérieur de plusieurs siècles au texte biblique.
Ce jour-là, il lit devant les membres attentifs de la Société d'Archéologie Biblique de Londres un texte figurant sur une douzaine de tablettes d'argile originaires de Chaldée.
Les tablettes remontent aux environs du XIIIe siècle avant J.-C.
Elles racontent en trois mille vers l'épopée d'un roi nommé Gilgamesh.
Celui-ci aurait régné vers 2 600 avant Jésus-Christ sur la cité d'Ourouk (ou Uruk).
Le récit du Déluge figure sur la onzième tablette.
Il est raconté par un homme, Utanapishtim, qui dit avoir été informé par le dieu de la Sagesse que l'assemblée des divinités aurait décidé de détruire l'humanité.
Le dieu de la Sagesse donne alors ce conseil à Utanapishtim :
« Démolis ta maison pour te faire un bateau ! Renonce à tes richesses pour sauver ta vie ! Détourne-toi de tes biens pour te garder sain et sauf ! Mais embarque avec toi des spécimens de tous les animaux ... »
Puis il est écrit :
« Six jours et sept nuits durant, bourrasques, pluies battantes, ouragans et déluge continuèrent de saccager la terre. »
Nous sommes loin des quarante jours et quarante nuits mentionnés dans la Bible.
Le récit biblique du Déluge et celui de l'épopée de Gilgamesh se recoupent ... mais comportent de multiples différences.
Quoi qu'il en soit les peuples du Proche-Orient portaient en eux un héritage commun de l'inconscient collectif : le Déluge.
Dans l'un et l'autre cas, il apparaît que l'inondation est motivée par le comportement de l'humanité qui a déplu à la divinité.
Cet évènement inscrit dans la mémoire commune des peuples est l'héritage d'un véritable traumatisme.
Certains analystes ont établi des recoupements avec la rapidité de la montée des eaux lors de la fonte des glaces au Quaternaire.
Certes, celle-ci s'est traduite par une élévation du niveau des mers de plusieurs dizaines de mètres et des pluies abondantes, mais le phénomène s'est échelonné sur plusieur siècles.
Il a pu toutefois être très spectaculaire aux abords de la Mer Noire et s'inscrire dans une tradition orale qui, de père en fils, a transmis le souvenir d'un Déluge dévastateur.
Il y a 7 500 ans, selon certains géologues, le niveau de la Méditerranée alimentée par la fonte des glaces aurait ouvert une brèche dans le détroit des Dardanelles.
Ceci aurait libéré dans le bassin de la mer Noire des forces "200 fois supérieures aux chutes du Niagara".
Ses rives auraient été submergées à la vitesse d'un kilomètre par jour. En moins d'un an, l'ancien lac d'eau douce se serait élevé de 180 mètres au dessus de son niveau initial.
Est-ce à cause de cela que de nombreuses cultures (sumérienne, babylonienne, assyrienne, grecque...) ont gravé dans leur mémoire collective, puis dans l'argile, cet épisode traumatisant ?
Au total, treize textes profanes et sacrés qui relatent l'engloutissement du monde ont été identifiés.
Quel est le plus ancien ?
Quel est le plus proche de la réalité ?
La réalité ne s'est-elle pas transformée en mythe ?
Mais qu'est-ce qu'un mythe ?