La notion d'abomination a suscité et suscitera encore des controverses.
Au centre de la polémique se trouve l'homosexualité.
Il est notamment écrit dans la Bible à ce sujet :
« Tu ne coucheras point avec un homme comme on couche avec une femme. C'est une abomination. » (Lévitique 18.22)
Par assimilation, on se réfère alors à ce passage de la Genèse où les habitants de Sodome viennent frapper à la porte de Loth en disant :
« Où sont les personnes qui sont venues chez toi cette nuit ?
Montre-les nous que nous les connaissions ! »
(Genèse 19.5)
Mais la Bible ne réserve pas le terme d'abomination à l'homosexualité.
Le Livre du Lévitique vise notamment toutes sortes de pratiques sexuelles entre membres de la même famille (Lévitique 18.6-18), les relations adultères (18.20), le sacrifice des enfants (18.21), la zoophilie (18.23) ...
« Car tous ceux qui commettront quelqu'une de ces abominations seront retranchés du milieu de leur peuple. » (Lévitique 18.29)
La notion d'abomination est aussi employée à propos des interdits alimentaires, notamment lors du partage des repas entre Hébreux et Égyptiens :
« Ils prirent place, lui à part, et eux à part, et les Égyptiens qui mangeaient avec lui, à part. Les Égyptiens ne peuvent pas manger le pain avec les Hébreux car c’est une abomination pour les Égyptiens. » (Genèse 43.32)
Les interdits alimentaires se déclinent différemment selon les religions.
Le Livre du Lévitique, pour sa part, au chapitre 11, distingue les animaux purs ou impurs.
La consommation de ces derniers est aussi qualifiée d'abomination.
Ces prescriptions se sont tellement imprégnées dans les consciences que ce fut une incompréhension pour l'apôtre Pierre de recevoir l'ordre, de la part du Seigneur, de commettre une abomination !
Il s'agissait en effet pour Pierre de manger toutes sortes d'animaux, purs comme impurs.
A ce moment, la voix du Seigneur se fit entendre :
« Ce que Dieu a rendu pur, ne le regarde pas comme souillé. » (Actes des Apôtres 10.15)
Les interdits alimentaires, sources d'abomination, n'existaient plus !
Désormais, pour les disciples, ce sera par la foi en Jésus que l'on se purifiera, et non par la loi de Moïse.
Nombre de croyances religieuses ont institué toutes sortes d'interdits alimentaires et, dans ce cadre, l'abomination peut se définir comme étant tout ce qui peut déplaire à la divinité.
Mais la définition de l'abomination ne s'arrête pas là !
Dans le cas présent, ce sont les bergers qui sont une abomination pour les Égyptiens.
La notion d'abomination ne dépend pas ici de la divinité mais du fait que les Égyptiens étaient des cultivateurs sédentaires qui ne supporteraient pas de voir des troupeaux envahir leurs terres ensemencées.
En isolant les bergers hébreux sur la terre de Goshen, non exploitée par les cultivateurs, le risque de conflit était écarté.
Ainsi, l'abomination peut se définir comme étant ce qui n'est pas conforme aux pratiques dominantes d'une communauté, qu'il s'agisse de pratiques religieuses, économiques, culturelles, sociales ou autres.
De ce fait, ce qui est abominable pour les uns ... ne le sera pas pour les autres.
Si l'élevage était une abomination pour les cultivateurs égyptiens, il n'en allait pas de même pour les éleveurs hébreux.
Le nomadisme pastoral pratiqué par les Hébreux, comme tout nomadisme, s'est toujours heurté aux sédentaires, aux populations précédemment installées qui n'entendaient pas voir leurs territoires dévastés par des troupeaux de passage.
Jusqu'au jour où les nomades se sédentarisent et considèrent, à leur tour, tous les nouveaux arrivants comme une abomination ...