Essayons d'imaginer ce que l'homme qui s'est entendu dire cela par Joseph a pu ressentir ?
La peur ? L'inquiétude ? Le doute ou tout simplement le rejet de cette interprétation ?
Ne s'attendait-il pas aussi à une interprétation favorable de la part de Joseph puisqu'il est écrit : « Le maître panetier vit qu’il avait bien interprété ... » (Genèse 40.16)
Car autant il peut être facile d'accueillir avec joie une prémonition positive comme celle que Joseph a révélé à l'échanson, sans savoir si elle est vraie ou fausse, autant nous serons enclins à ne pas croire ce qui peut s'annoncer comme négatif ... et peut être mortel.
Quand Elohim dit au premier couple humain ...
« Mais de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, tu n'en mangeras pas !
Car du jour où tu en mangeras, c'est la mort : tu mourras ! »
(Genèse 2.17)
... on peut rapprocher cette parole d'une prémonition, ou d'une prophétie négative.
L'ont-ils cru ?
Non, pas plus que les Israélites croyaient les prophètes qui annonçaient l'effondrement d'Israël puis de Juda.
Comme le premier couple humain préféra écouter le serpent qui leur promettait monts et merveilles, le peuple élu préférait écouter les faux prophètes qui les éloignaient de la parole de Dieu.
On n'écoute pas les oiseaux de mauvais augure ... l'expression est même entrée dans le langage courant pour désigner les personnes qui annoncent de mauvaises nouvelles.
Cette expression est liée à une pratique ancienne de divination qui consistait à observer le passage des oiseaux pour prétendre discerner la volonté des dieux.
Vautours, corbeaux et autres volatiles ont pu ainsi être considérés comme oiseaux de mauvais augure ... d'autant qu'il leur incombe de nettoyer les restes des créatures mortes.
Est-ce ce genre d'oiseaux que le panetier a vu dans son rêve (Genèse 40.17) ?
Ce n'est pas précisé, mais c'est ce type de charognards que Joseph voit dans son interprétation.
Il est intéressant de noter le parallélisme des formes lorsque Joseph emploie par deux fois le même mode d'expression.
Nous pouvons lire en Genèse 40.13 et 19 : « Pharaon élèvera ta tête ... »
Dans le premier cas, pour l'échanson, cette élévation est un relèvement de l'homme qui avait été destitué.
C'est une élévation sociale par une restauration dans ses fonctions.
Dans le second cas, le panetier, l'élévation de la tête est une pendaison, et l'on peut imaginer le corps de cet homme sous sa tête que l'on a élevée ... presque enlevée de lui.
Le style biblique n'est pas toujours facile à lire mais si l'on se donne le temps d'approfondir ce que nous lisons, nous pouvons voir à quel point ce qui nous est livré par la parole de Dieu peut être imagé.
Des images qui seront souvent choquantes.
Des images qui sont faites pour faire réagir le lecteur ... ou l'auditeur car la Torah est lue chaque semaine dans les synagogues.
Mais est-elle pour autant écoutée avec attention pour en tirer les conclusions qui s'imposent dans la gestion de nos vies ?