Livre de LA GENESE ... Etudes et commentaires de la Bible



La prostitution de Tamar

« Juda la vit, et la prit pour une prostituée,

car elle avait couvert sa face. »

(Genèse 38.15)

La prostitution

La pratique de la prostitution remonte à la nuit des temps.

Elle répond d'une part à la misère sociale de personnes qui trouvent ainsi les moyens matériels de leur survie.

Elle répond d'autre part à la misère sexuelle d'individus qui pensent pouvoir ainsi satisfaire leurs pulsions.

Pour les uns comme pour les autres, la prostitution est le reflet d'un monde où le matériel, le charnel, l'emporte sur le reste.

Est-ce afin de vouloir donner une apparence de spiritualité que fut imaginée "la prostitution sacrée" ?

Dans un texte sumérien écrit vers 2300 avant Jésus Christ, il est question de la déesse Ishtar, qualifiée de hiérodule, ce qui signifie "prostituée sacrée".

Elle est représentée voilée.

En l'honneur de cette "déesse", la prostitution se déroulait dans des lieux de culte.

Ainsi, les prêtres des temples païens pouvaient vivre du fruit de la prostitution des fidèles, transformant ainsi le temple en une "maison de passe".

Cette pratique en vigueur à Babylone est confirmée par l'historien grec Hérodote qui vécut au Ve siècle avant Jésus Christ :

"Lorsqu'une femme est assise là, elle doit attendre pour retourner chez elle qu'un étranger lui ait jetée de l'argent sur les genoux et se soit uni à elle à l'intérieur du temple (...).

Lorsqu'elle s'est unie à l'homme, elle a acquitté son devoir à l'égard de la déesse et peut revenir chez elle ..."

Les Israélites allaient aussi connaître de telles pratiques bien qu'elles soient condamnées dans la Loi de Moïse :

« Il n'y aura aucune prostituée parmi les filles d'Israël, ni aucun prostitué parmi les fils d'Israël.

Tu n'apporteras pas dans la maison de l'Eternel, ton Dieu, pour l'accomplissement d'un vœu, le salaire d'une prostituée ... » (Deutéronome 23.18-19)

Israël fut contaminé jusqu'au Temple de Jérusalem et le roi Josias est intervenu vigoureusement au VIIe siècle avant Jésus Christ :

« Il démolit les logements des prostitués qui se trouvaient dans la maison de l'Eternel et où les femmes tissaient des toiles pour Astarté. » (2 Rois 23.7)

Dans le cas de Tamar, il n'est nullement question de prostitution sacrée mais plutôt d'un acte banal de prostitution entre une femme voilée, donc non identifiable, et Juda.

S'agissant du port du voile, il convient de distinguer le port du voile sur la tête qui pouvait avoir une toute autre signification, et le port d'un voile qui couvre le visage pour garder l'anonymat de la prostitution.

Ainsi la prostituée est cachée ... et permet à celui qui lui rend visite, qu'il soit ou non marié, de s'unir dans le secret ...

« L'œil de l'adultère épie le crépuscule.

"Personne ne me verra", dit-il, et il met un voile sur sa figure. » (Job 24.15)

Le voile sur la figure est donc bien représentatif de la volonté d'agir sans être vu.

C'est ainsi que Juda se retouva, sans le savoir, uni à sa belle-fille.

Pour quelle raison Tamar agit-elle de la sorte ?

Genèse 38.14 nous dit « car elle voyait que Shéla avait grandi, et qu’elle ne lui était pas donnée pour femme. »

Shéla, troisième fils de Juda, héritait de l'obligation du lévirat envers Tamar.

Er l'époux de Tamar étant décédé sans lui donner d'enfant et Onan s'étant refusé à donner un héritier à Er en s'unissant à Tamar, il incombait à Shéla de faire ce qu'Onan, décédé à son tour, avait refusé.

Juda s'était engagé en ce sens en disant à Tamar : « Demeure veuve dans la maison de ton père, jusqu’à ce que Shéla, mon fils, ait grandi ! » (Genèse38.11)

En agissant de la sorte, Tamar entend faire respecter le principe du lévirat que Juda semble avoir oublié.

Ce faisant, elle transforme une obligation rituelle qui avait valeur légale en un acte qui n'est pas légal ... mais légitime.

Peut-on la blâmer d'avoir agit ainsi ?

En s'unissant à Juda, le père de son époux décédé, elle donnait un prolongement à la lignée de Juda.

C'est ainsi, du moins, qu'elle pouvait le considérer.

Tout ceci peut nous sembler bien étrange tant ces préoccupations sont loin de notre pensée moderne.

Mais il faut souvent savoir s'adapter à la pensée des autres afin de mieux les comprendre ... sans pour autant les juger en bien ou en mal !

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Traduction interlinéaire
de la Genèse

Chapitre 38 ~ Versets 38.15 à 38.25

15. Juda la vit, et la prit pour une prostituée, car elle avait couvert sa face.

16. Il se tourna vers elle, sur le chemin, et dit : « Permets-moi, je te prie, de venir avec toi. » Car il ne savait pas que c'était sa belle-fille. Elle dit alors : « Que me donneras-tu pour venir avec moi ? »

17. Il dit : « J’enverrai un chevreau du troupeau. » Elle répondit : « Bien, si tu donnes une garantie jusqu’à ce que tu l’envoies. »

18. Il dit : « Quelle garantie te donnerai-je ? » Elle répondit : « Ton cachet, ton cordon, et ton bâton qui est dans ta main. » Il lui donna et vint vers elle, et elle fut enceinte de lui.

19. Elle se leva et s’en alla, puis ôta son voile. Elle remit ses vêtements de veuvage.

20. Juda envoya le chevreau du troupeau par les soins de son ami, l’Adullamite, pour récupérer la garantie de la main de la femme. Mais il ne la trouva pas.

21. Il interrogea les gens du lieu en disant : « Où est la prostituée qui était sur le chemin d'Énaïm ? » Ils répondirent : « Il n’y a pas eu ici de prostituée. »

22. Il retourna vers Juda et dit : « Je ne l’ai pas trouvée, et même les gens du lieu ont dit qu'il n’y avait pas eu ici de prostituée. »

23. Juda dit : « Qu’elle garde pour elle ce qu'elle a, au moins nous ne serons pas méprisables. Voilà : j’ai envoyé ce chevreau, et toi tu ne l’as pas trouvée ! »

24. Il advint, environ trois mois après, qu’on informa Juda en disant : « Tamar, ta belle-fille, s’est prostituée. Et voici, elle est même enceinte de ses prostitutions ! » Alors Juda dit : « Faites-la sortir, et elle sera brûlée ! »

25. On la fit sortir et elle fit dire à son beau-père : « C’est de l’homme à qui sont ces choses que je suis enceinte. » Puis elle dit : « Reconnais-donc, je te prie ! A qui sont ce cachet, ce cordon, et ce bâton ? »