Lorsque Jacob manifeste son intention de quitter la maison de Laban, la réponse de ses deux filles, Rachel et Léa, est très vive.
Sans hésitation elle sont prêtes à suivre Jacob.
Certes, ce choix est conforme à ce qui est écrit ...
« C'est ainsi que l'homme quitte son père et sa mère et s'attache à sa femme ; et ils deviennent une seule chair. » (Genèse 2.24)
... car ce qui est valable pour l'homme l'est tout autant pour la femme qui doit suivre son époux.
Mais dans le cas présent, le départ de Rachel et Léa aux côtés de Jacob se fonde plus sur un profond ressentiment envers Laban que sur les prescriptions de Dieu.
Elles n'en demeurent pas moins attachées aux recommandations divines que Jacob a pu recevoir en rêve :
« Et maintenant, fais tout ce qu'Elohim t'a dit ! » (Genèse 31.16)
Mais elles reprochent à leur père de les avoir traitées comme des "étrangères".
Leur accusation se fonde sur les motifs suivants :
- il nous a vendues,
- il mange notre argent,
- aucun héritage ne peut leur être réservé (Genèse 31.14) puisque Laban a des fils.
A l'inverse, les fils de Laban vont hériter de tout ce que leur père pouvait posséder, ou espére posséder, ce qui explique leur réaction négative à l'encontre de Jacob (Genèse 31.1).
Concernant le fait qu'elles se considèrent comme "vendues" et volées par leur père, le rabbin Rachi a fourni à juste titre ce commentaire :
"Là même où il est d’usage de doter ses filles, au moment de leur mariage, il s’est conduit envers nous comme envers des étrangères, puisqu’il nous a vendues à toi (Jacob) en rétribution de ton travail."
Laban n'a plus de filles !
Non content de les avoir vendues, dépourvues de dot, il se rémunère sur le compte de Jacob et prive d'autant ses deux épouses : Léa et Rachel.
« Si quelqu’un ne prend pas soin des siens, et surtout ceux de sa famille, il a renié la foi, et il est pire qu’un incroyant. » (Première épître à Timothée 5.8)
Nous sommes bien loin des prescription de Paul à Timothée !
Mais Laban considérait probablement que ses filles n'étaient plus de sa famille ... puisque Jacob, en les épousant, se devait de subvenir à leurs besoins.
Pourtant Laban, quand il se lance à la poursuite de Jacob et finit par le rejoindre, va user d'arguments qui pourraient laisser croire que Laban ressent quelque attachement affectif envers ses filles :
« Les filles sont mes filles, les fils sont mes fils, le troupeau est mon troupeau, et tout ce que tu vois est à moi. » (Genèse 31.43)
Mais sa liste ne s'arrête pas à ses filles, ou à ses petits-fils ... il ajoute le troupeau !
Car ce qui anime Laban, c'est avant tout le sentiment de propriété sur ses biens comme sur sa descendance.
Tout ce qui vit dans sa maison peut être une source de revenus et c'est en fait la cupidité qui anime Laban.
C'est ce que pressentait Jacob, par rapport à Rachel et Léa, quand il dit :
« J'étais dans la crainte en pensant que tu m'arracherais tes filles. » (Genèse 31.31)
C'est souvent dans les épreuves que l'on voit poindre le véritable caractère des individus.
Dans la vie courante, Laban, comme tant d'autres, a pu paraître comme un honnête homme sachant vivre au milieu des siens dans l'intérêt collectif.
Mais la fuite de Jacob révèle la véritable personnalité de Laban.
A ceci va s'ajouter une autre facette de son personnage : son profil spirituel.
Car Laban, comme beaucoup en son temps, était idolâtre !