Livre de LA GENESE ... Etudes et commentaires de la Bible



Les interdits alimentaires

« Ils prirent place, lui à part, et eux à part,

et les Égyptiens qui mangeaient avec lui, à part.

Les Égyptiens ne pouvaient pas manger le pain avec les Hébreux

car c’est une abomination pour les Égyptiens. »

(Genèse 43.32)

Les interdits alimentaires

Un repas peut être un moment de convivialité ... ou un grand moment de solitude !

Eliminons la situation où les convives se mettent à table après s'être disputés et où le silence règne pendant que les uns et les autres ruminent leur mécontentement.

Ce n'est pas en effet le cas de Joseph, de ses frères et des Égyptiens.

La distanciation sociale a une autre cause ...

Ce repas aurait pu être un moment de partage, une communion sociale entre Hébreux et Égyptiens, mais cela ne se fera pas.

Car l'interdit règne !

La plupart des religions ont institué des prescriptions, des interdits alimentaires portant sur telle ou telle chose, liquide ou solide.

Certaines religions prévoient que des aliments ou des boissons peuvent être consommés à condition d'avoir reçu un traitement particulier d'ordre religieux.

Enfin, il y a aussi celles et ceux qui refusent de s'attabler avec des individus qui ne partagent pas leurs croyances, ou qui sont étrangers.

Pourquoi les Égyptiens ne peuvent pas manger le pain avec les Hébreux ?

Une grande partie de la population de l'Égypte antique vénérait les animaux sacrés, associés aux divinités, ce qui impliquait une sorte de "végétarisme religieux" comportant une abstention assez large des produits carnés du fait de la sacralité du règne animal, en particulier les bovins.

La consommation de viande était réservée aux dirigeants.

A l'époque de Joseph, les Hébreux ne connaissaient pas encore les interdits alimentaires que la loi de Moïse allait instituer.

Quoi qu'il en soit, leur régime alimentaire n'était pas compatible avec les interdits que les Égyptiens s'imposaient.

Il est aussi possible que ces interdits portent sur l'origine ethnique : puisque les Hébreux ne partageaient pas leurs croyances, les Égyptiens ne pouvaient partager leurs repas.

« Les hommes étaient étonnés de se retrouver ainsi. » (Genèse 43.33)

Joseph n'est pas Égyptien ... mais ses frères Hébreux l'ignorent.

Ils sont donc surpris de se retrouver à sa table, surprise d'autant plus grande que Joseph est une personnalité en Égypte et eux de simples voyageurs.

Ils seront à sa table ... mais de l'autre côté de cette table.

« Ils burent et se réjouirent avec lui. » (Genèse 43.34)

C'est ainsi que, malgré les interdits alimentaires qui génèrent des barrières sociales, la convivialité a pu s'installer au cours de ce repas.

Ceci illustre le fait que les prescriptions religieuses et les normes sociales peuvent être un obstacle à l'amitié entre les peuples ... ou être contournées !

Cet obstacle restera trop souvent une barrière infranchissable.

« Les Égyptiens ne pouvaient pas manger le pain avec les Hébreux car c’est une abomination pour les Égyptiens. »

Une abomination ... un mot plusieurs fois utilisé dans la Bible et qui suscite une réaction catégorique de rejet : "C'est abominable !"

Ce mot apparaît pour la première fois dans la Bible dans ce verset ... et sera ensuite utilisé pour qualifier toutes sortes de comportements.

On le trouve notamment au sujet des pratiques sexuelles entre membres de la même famille (Lévitique 18.6-18), à propos des relations adultères (18.20), du sacrifice des enfants (18.21), de la zoophilie (18.23) ...

La consommation de certains animaux jugés impurs sera aussi considérée comme abominable ... ou encore le fait, pour un commerçant, de fausser les balances (Proverbes 11.1).

Que l'on se réfère aux croyances des Égyptiens, ou à celles des Juifs, il s'avère que l'abomination peut se définir comme étant tout ce qui peut déplaire à la divinité.

Dans notre langage moderne, c'est un terme très fort que l'on utilise peu et le plus souvent d'une façon ciblée.

Mais il semble évident que la notion d'abomination était beaucoup plus large sous l'Antiquité et se révèle en fin de compte assez proche de la notion de péché.

La gravité du péché peut conduire à le qualifier d'abomination ... mais tout le monde n'a pas la même échelle de valeurs.

Et qui sait si celui qui juge son prochain en qualifiant ses actes d'abomination ne sera pas lui-même jugé pour ses propres abominations ...

< < < Retour au sommaire < < < 322-GEN 43.32 > > > Une machination > > >


Traduction interlinéaire
de la Genèse

Chapitre 43 ~ Versets 43.26 à 43.34

26. Joseph vint à la maison, et ils lui apportèrent, dans la maison, le cadeau qu'ils avaient en main. Ils se prosternèrent devant lui contre terre.

27. Il leur demanda s’ils allaient bien, puis il dit : « Votre père, le vieillard dont vous m’avez parlé, va-t-il bien ? Est-il encore vivant ? »

28. Ils répondirent : « Ton serviteur, notre père, va bien. Il est encore vivant. » Ils inclinèrent la tête puis se prosternèrent.

29. En levant les yeux il vit Benjamin, son frère, fils de sa mère. Il dit : « Est-ce là votre frère, le plus jeune dont vous m’avez parlé ? » Il dit alors : « Elohim te sera favorable, mon fils. »

30. Joseph se hâta, ému jusqu'aux entrailles à cause de son frère. Il cherchait où pleurer et entra dans la chambre pour y pleurer.

31. Puis il se lava la face et sortit. Il maîtrisa son émotion puis il dit : « Prenez place pour le pain ! »

32. Ils prirent place, lui à part, et eux à part, et les Égyptiens qui mangeaient avec lui, à part. Les Égyptiens ne peuvent pas manger le pain avec les Hébreux car c’est une abomination pour les Égyptiens.

33. Ils s’assirent face à lui, le premier-né selon son droit d’aînesse, et le plus jeune selon sa jeunesse. Les hommes étaient étonnés de se retrouver ainsi.

34. Il leur fit porter des plats qui étaient face à lui. La portion de Benjamin était cinq fois plus grande que celle des autres. Ils burent et se réjouirent avec lui.